Comment réagiriez-vous si l'on vous apprenait que l'une de vos plus proches amies venait de mourir juste comme ça, simplement parce qu'elle se trouvait au mauvais endroit, au mauvais moment? Personnellement, je suis présentement en train de m'évanouir pour la première fois de ma vie afin de me protéger de cette atroce nouvelle parce que moi, Eliott Saint-James, je ne me sens pas pour l'instant pas à appréhender la nouvelle. Pas alors que je ne sais pas où Amy peut bien se trouver et que mes craintes pour elles participent aussi activement que paradoxalement à mon malaise.


Un unique bruit rompt le silence oppressant qui m'entoure : celui de ma respiration. Elle est hachée à cause de l'angoisse qui m'étreint violemment depuis que je suis arrivé dans ce lieu que je ne reconnais pas. Je me demande où se trouve Amy Hilnavy. Je prie pour qu'elle ne soit pas avec moi. Le lieu dans lequel je me trouve est trop détestable pour ça. L'atmosphère est saturée d'humidité, j'ai la désagréable sensation que mes vêtements sont moites et me collent à la peau sans que je ne puisse remédier à cela. Le manche de ma canne n'est pas coincée dans ma main et sa dragonne ne se trouve pas non plus autour de mon poignet. Du pied, je tâte le sol autour de moi pour voir si elle ne s'y trouve pas mais c'est un échec. Je suis sans guide. Il ne me reste que mes sensations corporelles. Déglutissant afin de me donner la volonté nécessaire pour tâtonner autour de moi, je m'exécute finalement et mes doigts ne tardent pas à timidement rencontrer deux murs de briques recouverts de mousse végétale, de chaque côté de mes flancs. De la sueur perle sur mon front, contribuant à renforcer l'humidité ambiante, et je sens l'angoisse m'enserrer plus jalousement encore que précédemment dans son giron tandis que j'essaie de comprendre ce qu'il se passe. Théoriquement, du fait que je ne voie pas, je suis parfaitement éveillé mais le problème est que je ne me souviens pas le moins du monde de la façon dont je suis arrivé là. Quelque chose me pousse toutefois à avancer et mes jambes se mettent en marche mécaniquement sans que le rythme de ma respiration ne consente à se calmer. Une odeur familière, fruitée, presque aussi délicieuse que celle d'Amy, flotte brusquement jusqu'à moi et lorsque j'identifie la personne à qui elle appartient, ma respiration s'apaise instantanément parce que maintenant que Némésis Hell est avec moi, je ne suis plus aussi vulnérable. De plus, pendant un instant, j'ai craint, malgré la différence de parfum, que ce ne soit ma douce Amy qui ne soit là mais visiblement, elle se trouve toujours ailleurs, loin, dans un endroit meilleur que celui là. Je l'espère de tout mon cœur, en tout cas. Un petit sourire aussi ravi que gentil étire mes lèvres alors que mes jambes arrêtent leurs mouvements pour ne pas heurter Némésis et l'humidité de l'air me paraît moins étouffante. Précautionneusement, une de mes mains se lève ensuite pour presser avec légèreté une des épaules de la jeune femme devant moi, laquelle ne se dérobe heureusement pas à mon étreinte et mon sourire se stabilise sur mes lèvres. Soulagé de ce fait que j'ai interprété comme une muette confirmation de son identité, j'ouvre la bouche pour parler mais un souffle d'air humide caresse ma joue, me rappelant ainsi brusquement mon angoisse précédente et je referme la bouche, incapable d'articuler le moindre son. Néanmoins, une fois encore je déglutis et d'une voix nouée par la crainte, je parviens enfin à m'exprimer :

- Némésis... Où nous trouvons-nous, s'il te plaît?